France : Des négociations sur le traité international contre la pollution plastique à Paris 

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La France organise à l’UNESCO un sommet ministériel à Paris du 29 mai au 2 juin pour progresser sur un traité international contre la pollution plastique, préalablement approuvé par un accord. Les Nations Unies  ont en effet conclu le 2 mars 2022 un accord historique, la première décision mondiale visant à mettre fin à la pollution plastique. Suivies par une première session de négociations en Uruguay fin 2022, les discussions sur le traité se dérouleront à Paris toute la semaine. Elles seront suivies par trois autres sessions d’ici fin 2024 et devraient faciliter l’adoption du traité prévue en 2025. Explications. 

Par Houmi Ahamed-Mikidache 

Le futur traité comportera une série de mesures contraignantes et volontaires visant à lutter contre la pollution plastique.  Il devrait couvrir les mesures que chaque pays devra prendre tout au long du cycle de vie du plastique, de la conception, à la production,  en passant par la consommation mais aussi par la gestion des déchets. 

Quels sont les enjeux de ce traité?

“La lutte contre la pollution plastique est une priorité majeure pour la France et nous sommes résolus à prendre toute notre part de cet effort collectif. Nous avons déjà adopté une trajectoire déterminante au niveau national, avec la loi AGEC en particulier, pour diminuer les usages du plastique, développer une filière circulaire, favoriser la collecte et le recyclage des déchets, investir dans des technologies innovantes et mettre fin à tous les rejets de micro-plastiques, particulièrement dévastateurs”, explique en amont du sommet Christophe Bechu, ministre français de la transition écologique et des territoires.

 La loi AGEC, plus précisément, la « loi anti-gaspillage pour une économie circulaire » a été votée en France le 10 février 2020. Plusieurs pays ont adopté et promulgué des lois portant interdiction de l’usage du plastique telles que celles sur l’usage des sachets plastiques. Mais c’est leur application qui fait défaut. Le 05 octobre 2017, le président de la République de l’Union des Comores Azali Assoumani a promulgué une loi portant interdiction de l’importation, de la commercialisation et de la distribution des emballages et sachets plastiques non biodégradables. Mais, cette loi n’est pas appliquée dans ces îles situées dans l’océan indien.

 Le traité international participera  à l’homogénéisation des définitions au champ lexical de la lutte contre la pollution plastique. Les références à l’économie circulaire et aux microplastiques y seront intégrées.  Le caractère juridiquement contraignant de l’accord incite les Etats à prendre des mesures volontaires sur la prise de conscience globale du rejet du plastique dans l’environnement, terre, mer et air.  Toutefois, la mise en œuvre du futur traité est loin d’être facile. Elle est sous conditions financières, et liée aussi au transfert de technologies accompagné d’un renforcement des capacités.

Les annonces américaines à Paris

Le sous-secrétaire américain José W. Fernandez en charge de la croissance économique, l’énergie et l’environnement et le secrétaire adjoint par intérim Littlejohn actuellement à Paris pour ce sommet ministériel ont récemment annoncé leur volonté de rencontrer des représentants du monde des affaires, de la société civile et d’autres intervenants afin de favoriser la coopération dans la lutte contre la pollution plastique.

Dans un communiqué, le Sous-Secrétaire Fernandez a annoncé la délivrance d’ une subvention de sept millions de dollars au Programme des Nations Unies pour l’environnement afin d’aider certains pays en développement à établir et à mettre en œuvre des plans d’action nationaux pour lutter contre la pollution plastique, faciliter l’échange d’informations et les bonnes pratiques, et appuyer la participation au processus des comités intergouvernementaux de négociation. En outre, le Sous-Secrétaire fait remarquer dans ce communiqué que le Département d’État travaille à l’établissement d’un partenariat public-privé, l’End Plastic Pollution International Collaborative (EPPIC), fournissant jusqu’à 14,5 millions de dollars pour aider à lancer cet effort. L’EPPIC réunira les gouvernements, les entreprises, la société civile, les philanthropes et d’autres pour galvaniser l’action mondiale sur la pollution plastique et se concentrer sur l’avancement des solutions circulaires et scientifiques pour réduire, réutiliser et recycler le plastique.

D’après des données vérifiées reprises par le ministère français de la transition écologiques et des territoires, chaque année, environ 460 millions de tonnes de plastiques sont produites. 353 millions de tonnes deviennent des déchets soit le poids de près de 35000 tours Eiffel, faisant ainsi , du plastique le troisième matériau le plus fabriqué au monde, derrière le ciment et l’acier. Synonyme de progrès et de modernité pendant de nombreuses années, le plastique pose aujourd’hui question en raison de la pollution qu’il engendre. Contrairement aux autres matériaux, son cycle de vie est particulièrement court : aujourd’hui, 81% des produits fabriqués en plastique finissent en déchets en moins d’un an. Parmi ces déchets, seuls 9% sont recyclés aujourd’hui dans le monde, 20% incinérés, près de la moitié terminent dans des décharges tandis que plus de 20% sont brûlés à l’air libre ou abandonnés dans la nature.  La pollution plastique est devenue un fléau mondial aux conséquences néfastes pour la santé humaine et l’environnement. Chaque minute, 15 tonnes de plastique sont ainsi rejetées dans l’océan, ce qui amène les débris de plastiques à constituer 85% des matériaux polluants en mer. De fait, il pourrait y avoir plus de plastique que de poissons dans l’océan d’ici 2050. 

Les déchets plastiques au bord de la mer à Moroni ( Comores)/ Crédit Photo: Houmi AHAMED-MIKIDACHE

“Tout retard pourrait mener à une hausse de 80 millions de tonnes de pollution plastique de plus par an, d’ici 2040” 

Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement prône d’adopter une démarche de réduction drastique de la production du plastique, à diviser par 2 pour passer de 380 millions de tonnes par an à seulement 149 millions. Une chute vertigineuse qui oblige à revoir radicalement la place du plastique. L’agence des Nations Unies pour l’Environnement alerte que  tout retard pourrait mener à une hausse de 80 millions de tonnes de pollution plastique de plus par an, d’ici 2040. 

Le 14 décembre 2022, l’Assemblée Générale de l’ONU a adopté à l’unanimité  la résolution “Promouvoir des initiatives zéro déchet pour faire progresser le Programme de développement durable à l’horizon 2030”, qui proclame le 30 mars Journée internationale zéro déchet.  La résolution a été présentée par la Turquie avec 105 autres pays. Après une première session de négociations en Uruguay fin 2022, la France accueille pendant six jours ce sommet ministériel au siège de l’UNESCO à Paris où sont représentés notamment plusieurs acteurs de la société civile du monde entier, des chefs d’entreprise et des élus de tous bords. Trois autres sessions de négociations sont prévues d’ici fin 2024 avant la conférence diplomatique d’adoption du traité en 2025.  

 

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